Une nouvelle génération
Une nouvelle génération est peut-être en train d’émerger.
Ma génération (née autour des années 1950) a connu la liberté individuelle, l’utopie révolutionnaire, la cause nationale et l’État-providence. La génération suivante (née autour des années 1970) a connu le confort. La nouvelle génération (née autour des années 1990) a connu le néolibéralisme, les familles recomposées et la dégradation de l’environnement.
Un Québécois de la génération XY
Dessin de Renaud Bouret
Jusqu'à tout récemment, cette nouvelle génération disposait de peu d’espace pour cultiver ses idéaux, dont toute jeunesse est friande.
Malgré le déclin académique de l’école publique, le savoir est maintenant accessible à qui veut l’acquérir, grâce à l’internet. Certains jeunes ne se privent pas d’en profiter.
De même que l’école a perdu le monopole de la transmission d’un savoir harmonisé, la télévision a perdu le monopole du récit politique fabriqué. La jeunesse possède — et diffuse — ses propres sources d’information, qui lui permettent de mettre à nu les demi-vérités et les à-peu-près du journal télévisé.
Les moyens modernes de communication — caméras de surveillances, téléphones intelligents, réseaux sociaux, etc. — ont fait craindre, dans un premier temps, l’avènement du Meilleur des mondes. Mais, par un retournement inattendu, c’est aujourd’hui le manifestant qui filme le policier, et la plante qui arrose le jardinier. Dans cette société du soi-disant éphémère où toute l’information reste éternellement gravée sur la Toile, les mensonges fugitifs, qui ont constitué, au fil de la démocratie, l’outil essentiel du pouvoir, acquièrent une permanence imprévue. Les contradictions du discours politique risquent désormais à tout moment d’être exposées en pleine lumière, et d’être diffusées à la vitesse de cette dernière. Verba manent! Ennuyeux pour la vie privée, mais carrément désastreux pour les démagogues.
Les conditions virtuelles de la politisation de la jeunesse étaient donc réunies.
La longue lutte des étudiants québécois, qui s’est heurtée à l’intransigeance et à l’arrogance du pouvoir politique, ainsi qu’à la jalousie des classes les plus soumises, a permis de transformer cette virtualité en réalité. Cent jours de lutte, c’est plus qu’il n’en faut pour mûrir, quand le climat est propice. Et comme toujours, nos dirigeants et leurs valets, qui n’ont pas vu le monde changer, sont en retard d’une guerre.
Bien des révolutions dans l’histoire se sont transformées en eau de boudin. Par contre, chaque fois qu’on prédisait la fin de l’histoire, on est vite tombé sur un os. Il reste donc des raisons d’espérer, grâce à cette nouvelle jeunesse, en un avenir moins cynique et plus généreux.
Les frais de scolarité universitaires québécois, qui étaient de 540 $ en 1989, font un bond de 187 % au début des années 1990. Ils sont ensuite gelés jusqu'en 2006. La hausse de 30 %, survenue en 2007, correspond exactement à la hausse des prix pendant cette période de gel. En dollars constants, les frais de scolarité sont par conséquent les mêmes en 2007 qu'en 1994. Il est donc faux de prétendre que les frais de scolarité n'ont pas augmenté depuis des lustres, ni même qu'ils n'ont pas suivi l'inflation.
Les frais de scolarité ont plutôt tendance à grimper sensiblement d'une génération à l'autre. Entre 1989 et 2016, ces frais auront été multipliés par 7 en dollars courants, et par 4 si on tient compte de l'inflation. Autrement dit, pour être admis à l'université, un étudiant de 2016 devra, tout bien calculé, débourser quatre fois plus ses parents.
1 commentaire:
Une présentation stylée et riche des mécanismes qui sous-tendent le mouvement étudiant actuel. On peut tout de même débattre de l'ampleur et de la persistence de ce changement social, ainsi que de ses causes qui sont certainement complexes et plurifactorielles.
Merci de prendre le temps d'écrire.
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