2009-01-25

La fontaine des amours

La sensuelle Maria

    Ce film de Jean Negulesco (1954) illustre de façon éloquente trois des thèmes dominants du cinéma hollywoodien.
  • 1. Le bien et le mal proviennent de l'individu et non de la société. Supprimons le méchant et les problèmes se règlent. Avec un peu de volonté, le héros peut toujours trouver le bonheur ou faire le bonheur des autres.
  • 2. Les spectateurs sont des gens modestes qui aspirent au confort matériel. Leurs héros proviennent donc d'un milieu d'honnêtes et courageux travailleurs, et se dirigent vers des professions ou des mariages qui leur apporteront le luxe tant convoité.
  • 3. Il existe trois sortes de femmes : la vierge, la putain et la mère.

L'innocente Anita

Dans la scène finale, au bord de la fontaine de Trevi, les trois femmes retrouvent leurs amants respectifs. Mais les embrassades soulignent la différence fondamentale entre les trois personnages. Maria Williams (la « putain ») pose un baiser passionné sur la bouche de Giorgio. Ne s'est-elle pas déjà donnée à lui dans son humble appartement, après que nous l'ayons quittée, allongée sur le lit? Anita (la « vierge ») se blottit dans les bras de son prince, séducteur repenti qui saura attendre le mariage avant de la posséder. Miss Frances (la « mère »), se contente de donner le bras à l'écrivain qu'elle aimait secrètement depuis quinze ans, car elle est retombée à l'âge des amours platoniques. Elle peut se vanter, cette vieille fille en puissance, d'avoir sauvé le mariage de ses deux compagnes, grâce à sa « maternelle » intervention.

La maternelle Frances

Toutes trois avaient quelques points en commun: elles partageaient une luxueuse villa, malgré leurs salaires plus que modestes; elles aspiraient au but suprême de la vie d'une femme, c'est à dire à un mariage qui leur assurera une position sociale et un niveau de vie confortables; elles ont forgé leur propre destin en n'hésitant pas, le moment venu, à prendre d'audacieuses initiatives personnelles; ce sont des self made women bien Américaines.

2009-01-18

Conseils pour la saison des grands froids

Il y a deux ou trois mois, avant les grands froids, j’ai proposé à ma prof de japonais de lui réparer une crevaison sur sa bicyclette presque neuve. En défaisant le pneu, nous avons constaté que le fabricant (étranger, ça va de soi) avait utilisé des chambres à air de 68 cm de diamètre pour des roues de 60 cm de diamètre. L’ouvrier avait donc dû plier la chambre à air en accordéon, près de la valve : chronique d'une crevaison annoncée. Pourquoi avoir utilisé un matériel de la mauvaise dimension, sachant que le client allait tôt ou tard payer les pots cassés? Peut-être parce que le fabricant (non-canadien, évidemment) avait mis la main sur un lot considérable de surplus de l’armée de libération, à très bon marché. Voilà sans doute l’explication de la pandémie mondiale de crevaisons dont furent victime, l’automne dernier, des dizaines de milliers de vélos achetés au printemps précédent.

Ce matin, il fait moins trente-sept degrés, et ça va durer plusieurs jours. On n’en croit pas le thermomètre. Les bonnes âmes s’empressent de nous rappeler un bon conseil : « Ne sortez pas sans vous couvrir, on perd 80% de sa chaleur par la tête ». Ce principe de gros bon sens, qui fait presque force de loi, m’a remis en mémoire l’incident de la chambre à air.

Je puis en effet certifier, par expérience, qu’une roue crevée perd 100% de son air par le trou. J’en déduis que, lorsqu’il fait moins trente-sept, la chaleur sortira du corps par le trou le plus proche. Il ne faut donc pas non plus sortir pieds-nus ou le ventre à l’air, même si on a enfilé une bonne tuque sur la tête.

La version de la prof de japonais

毎年春から秋にかけて私の主な交通手段は自転車になる。仕事に行くのも、友達に会いに行くのも、買い物に行くのも、大体ほとんどを自転車に乗って出かけている。 バスと違って待ち時間も無いし、渋滞も関係無い。運動も出来て、お金の節約できるから良いことだらけ。去年は約7ヶ月間、ほぼ毎日自転に乗るという生活をしていた。

Chaque année, du printemps à l'automne, je me déplace principalement en bicyclette. Que ce soit pour aller au travail, pour faire des courses ou pour rendre visite aux amis, c'est presque toujours le vélo qui me sert de véhicule. Contrairement à l'autobus, je n'ai pas à attendre, j'évite les embouteillages, je fais de l'exercice, j'économise de l'argent, bref, je n'y trouve que des avantages. L'année passée, pendant sept mois, j'ai circulé à vélo tous les jours de ma modeste vie.

Ce chat aux allures de samouraï, qui se tient devant le hangar à vélo de la prof de japonais, ne semble pas se soucier de la température sibérienne.

ただ、それだけ自転車に乗ると、それなりに予期せぬ出来事も起こるというもの。 去年は、前輪と後輪両方を含めて、5回タイヤがパンクするという事態に遭遇してしまった。 7ヶ月の間に5回のパンク。 平均すると1ヶ月に1回はパンクした事になる。パンクする度に自転車屋へ行き、チューブを取り替えてもらっていた。1回や2回位なら良いけれど、これが3回以上になってくると自分でなんとかしたいと思い始めた。パンクする度に$10も取られるなら、自分でやったほうが断然安上がりだし・・・・。そう考えていた時に5回目のパンク。じゃあ、これを機会に自分でチューブ交換が出来るようになろうと思って、私のフランス語の先生、レナちゃんに聞いてみた。物知りのレナちゃんなので、自転車の大きさにあったチューブの調べ方、チューブを買う時に注意すること、そしてpneu crevéとかla chambre à airなどの新しい語彙まで教えてくれた。

とりあえず、レナちゃんが教えてくれたサイズのチューブをカナディアンタイヤで購入。 家に戻ってレナちゃんに電話すると、すぐに来てくれてさっそくやり方を教えてくれた。最初、タイヤをはずすのに手こずったけれど、それが終わると後は思った以上に簡単だった。 こんなことなら最初から自分でやればよかったと、ちょっと後悔・・・・。

でもこれで一応やり方もわかったし、今年はパンクしてもとりあえず自分で何とかできるはず。 ただ一度しかチューブ交換してないので(しかもほとんどレナちゃんがやってくれた)、どれだけしっかりと覚えているかはちょっと疑問。まあ、でもなんとかなるでしょう。 だめだったら、またレナちゃんに聞いてみようと企んでいる他力本願な私でした。

  Vocabulaire japonais

Table des alphabets kana

2009-01-11

La fumeuse de l'autobus

Sa place favorite, dans l'autobus, est la banquette transversale adossée à la cabine du chauffeur. Ses places devrait-on plutôt dire, car elle occupe trois quarts de siège pour son sac et un siège et quart pour son postérieur. L'autobus est bondé, tous les matins, mais ses congénères n'osent pas faire valoir leurs droits, ils préfèrent souffrir debout, en silence. Un automobiliste ne cèdera jamais le passage à un confrère qui n'a pas la priorité, question de principe : pas de cadeau entre chauffeurs de boîtes de conserve. Mais le passager d'autobus appartient à une autre espèce. L'automobiliste est coq, le passager est marmotte. L'un est toujours prêt à monter sur ses grands ergots, l'autre se réfugie dans son terrier à la moindre alerte.

Lundi, elle occupe ses deux places dans l'autobus. Le troupeau de siffleux s'est résigné à faire le trajet sur ses pattes, cramponné aux poignées de sécurité. D'ailleurs, il existe une hiérarchie bien établie au sein des passagers. Les premiers embarqués, ceux qui habitent le plus loin en banlieue, ont des droits acquis. Ils trônent fièrement sur leurs banquettes comme la Marquise de Sévigné sur son fauteuil Louis XIV. Les autres, ceux qui grimpent à bord lorsque toutes les places sont déjà prises, sont des manants, des péons. Ils le savent et font preuve de l'humilité naturelle rattachée à leur condition.

Mardi, elle occupe deux places dans l'autobus. Le train-train habituel. Et la voici arrivée à destination. Elle ramasse son sac, qu'elle enfile sur sa large épaule, elle se dresse sur ses deux jambes et elle sourit béatement, comme Pavlov au son de la clochette. Une joie extraordinairement routinière l'attend, sans aucun doute. Elle dévale le marchepied d'un pas lourd et assuré, saute sur le trottoir, et se plante là, devant la portière ouverte, bloquant le passage. Les passagers qui la suivent se faufilent péniblement, sans un mot, sans un couinement, sans un sifflement. Le temps pour elle d'allumer sa cigarette et l'autobus est déjà reparti. Elle jouit de son bonheur sans bien s'en rendre compte, comme l'ivrogne qui regarde sa montre pour constater que minuit est passé, alors qu'il était seulement neuf heures, cinq minutes plus tôt.

Mercredi, la fumeuse occupe encore deux places dans l'autobus, avec son sac. Son sac, c'est plus qu'un marque-place, c'est presque une arme. À vrai dire, la fumeuse est comme ces conducteurs qui ignorent l'existence de leur rétroviseur. Quand elle pivote sur elle-même, la masse de son corps combinée à la formule d'Einstein transforme sa bandoulière en arme de destruction massive. Tout ce qui se trouve sur son orbite est balayé irrémédiablement, particulièrement les objets situés à la même altitude, soit, à peu de choses près, l'altitude d'un comptoir de bistrot. On ne compte plus les tasses de café bien frais emportées par la tornade. Elle les déquille les uns après les autres, tout en leur tournant royalement le dos. Si vous avez l'audace de la renseigner sur les dégâts, elle ne vous croit pas, ou du moins accuse-t-elle les victimes de négligence.

Jeudi, elle est heureuse, encore une fois. Elle a réussi à obtenir sa double place, sans compter la cigarette qui l'attend au bout du trajet. Car rien n'est jamais acquis dans la vie de l'aristocrate du transport en commun. Il suffirait que trois passagers déménagent en banlieue ou que deux automobilistes perdent leur permis de conduire pour que la hiérarchie de la basse-cour soit bouleversée. La vie du passager est pleine d'imprévu, comme la loterie nationale, ce qui la rend tout aussi passionnante.

Jeudi, elle occupe ses deux places dans l'autobus. Mais voilà-t'y pas qu'une petite vieille a embarqué avec le troupeau des péons, et qu'elle peine à s'accrocher à la main courante. A-t-on idée de se mêler au commun des mortels, en pleine heure de pointe, quand on est improductif? Mais le monde est ainsi fait : les Juifs ne voient pas les Palestiniens bombardés à Gaza, les Gazaouites ne s'émeuvent pas des Juifs massacrés à Bombay, et Madame de Sévigné n'aperçoit pas le paysan qui meurt de faim au bord du chemin. Pour la fumeuse, c'est simple: jusqu'à preuve du contraire, la petite vieille n'existe pas.

Seulement voilà. Un autre aristocrate de l'autobus, qui remplit à peine sa place vu sa maigreur maladive — et qui se mêle des affaires des autres — se porte à la rescousse de la pauvre vieille. Il apostrophe la jeune fumeuse et la prie poliment d'offrir à la grand-mère l'espace occupé par le sac redoutable.

La fumeuse agrippe son sac, sans mot dire, et le pose sur ses genoux. Mais elle n'en pense pas moins : le bonhomme est d'autant plus généreux qu'il s'agit pour lui de faire cadeau du bien d'autrui. Car, si les aristocrates des transports en commun s'accordent pour mépriser les péons, ils se jalousent férocement.

Vendredi, elle occupe à nouveau deux places dans l'autobus. Pas de petite vieille. Pas de maigrichon moraliste et à moitié chauve. Les marmottes se pressent, debout, dans l'allée, aveugles, soumises. Bientôt l'heure de la cigarette, en bloquant la sortie. La vie est simple après tout. On a l'impression qu'elle va durer des siècles.

2009-01-04

Le visage des Québécois (2)

Québécois N°1.

Le visage des Québécois des années 1970 et 1980
Dessin de Renaud Bouret
Couleurs de Rié Mochizuki
Décembre 2008

Les Québécois des années 1970 n'ont pas le même visage que leurs parents. Ils n'ont pas le même visage que leurs enfants. Ils ne racontent ni le même vécu ni les mêmes aspirations.

À vous de deviner ce qu'ils font dans leur vie…

Québécois N°2.

Québécois N°3.

Québécois N°4.

Voir d'autres visages de Québécois et de Québécoises.