2008-04-11

L'homme qui aimait les femmes

Dessin de Renaud Bouret - 1992

Dans L'homme qui aimait les femmes, film de François Truffaut, le héros, au moment où il est question de modifier le titre de son livre, se questionne sur l'utilisation de l'imparfait.

(L'éditrice) — Mais c'est drôle que vous ayez pensé à ça, parce que je voulais vous proposer celui-ci : L'homme qui aimait les femmes.
(L'homme) — Ah c'est bien. C'est un bon titre­… Oui, c'est intrigant, c'est bien. Mais pourquoi « qui aimait »? Pourquoi l'imparfait?
(L'éditrice) — C'est une question de sonorité. Ça sonne bien. Et puis, aussi, il me semble que cela marche bien avec votre style de récit. Vous êtes narratif. Vous n'avez pas peur de raconter une histoire.
L'homme qui aimait les femmes (1977)

Pourquoi l'imparfait? L'explication proposée n'en est pas une. On devrait plutôt se demander pourquoi l'imparfait sonne si bien alors qu'il est clair que cet homme aime encore les femmes. L'imparfait n'a donc pas ici pour fonction d'indiquer le passé, ni de souligner un penchant pour les longues histoires étirées dans le temps.

Quand les enfants se proposent de jouer à des jeux de rôle, ils utilisent naturellement l'imparfait : « Moi j'étais le docteur et toi tu étais le malade. » Ou encore : « Nous on était les cowboys et vous, vous étiez les Indiens. » Un fois encore (voir nos précédents billets sur le sujet : Langage de bébé et Imparfait ou passé simple), l'imparfait sert à confirmer un choix déjà préétabli. L'enfant ne propose pas à ses amis de distribuer les rôles, il leur demande plutôt de valider ses propositions. Dans L'homme qui aimait les femmes, il ne s'agit pas d'accoler au héros une quelconque caractéristique parmi d'autres, mais d'affirmer d'emblée que cette caractéristique fait partie intrinsèque de son personnage.

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