2008-01-09

La marge d'erreur d'Obama

Dessin de Renaud Bouret - 2008

Lundi soir, lors d'une réunion publique à Ames, M. Obama s'est félicité des résultats du sondage du Des Moines Register. « Mon avantage est au-delà de la marge d'erreur, cela veut dire qu'on peut y arriver », a-t-il dit. (AFP, 2008-01-01)

Selon le journal de Des Moines, capitale de l'Iowa, l'enquête accordait « 32 % des suffrages à Obama contre 25 % à Clinton et 24 % à Edwards. (...) La marge d'erreur [pour un niveau de confiance de 95 %] était de plus ou moins 3,5 % » et le nombre de personnes interrogées s'élevait à 800.

On serait porté à croire, au premier abord, qu'Obama recueillerait entre 28,5 % et 35,5% des votes, contre 21,5 % à 28,5 % pour Clinton. Les deux rivaux pourraient toujours se retrouver à égalité. Une marge d'erreur de plus ou moins 3,5 %, ça fait un intervalle de 7 %, soit justement celui qui sépare les deux aspirants. Obama n'y avait pas pensé.

De toute façon, ce genre de raisonnement très courant sur les marges d'erreur – Bill Clinton l'utilisait souvent – n'a aucun sens. Il existe une infinité de marges d'erreurs, qui dépendent chacune du degré de risque qu'on est prêt à prendre. Ici, il y a 95 % de chances que la marge d'erreur ne dépasse pas 3,5 %. Autrement dit, la probabilité que la marge d'erreur dépasse 3,5 % n'est que de 5 %.

Si on avait choisi d'être plus prudent (niveau de confiance de 99 %, par exemple), la marge d'erreur aurait atteint 4,55 %. On obtiendrait alors un score moins précis, mais plus sûr.

Par ailleurs, la marge d'erreur varie en fonction du pourcentage obtenu par chaque candidat. Il y a donc une marge d'erreur différente pour chaque proportion. La marge d'erreur de 3,5 % a été calculée pour un candidat qui recueillerait 50 % de la faveur des sondés. C'est un moyen pratique de ne pas inonder le lecteur d'une montagne de chiffres. Dans le cas d'Obama, qui obtient un score de 32 %, la véritable marge d'erreur n'est que de 3,23 %. Cette fois, Obama a sous-estimé son avance. D'autant plus que la probabilité de dépasser, voire d'approcher, la marge d'erreur est relativement faible.

Les résultats finals seront relativement proches des prévisions du sondage, une fois les indécis répartis. En fin de compte Obama obtiendra 38 %, Edwards 30 % et Clinton 29 %.

Tout nouveau tout beau! La reine est morte, vive le roi! Obama sera la coqueluche des journalistes, jusqu'à une prochaine et probable défaite.

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Il manque une variable importante dans tous les sondages et c'est la qualité de la méthodologie employée pour sélectionner et interviewer l'échantillon.

J'ai déjà répondu à un sondage très sérieux de Léger Marketing pendant les élections provinciales, mais la qualité de l'entretien fait croire qu'un biais s'introduit facilement dans ce genre de résultats.

Les intervieweurs ont souvent de la difficulté à s'exprimer clairement en français et le tout se fait dans un cadre pas très sérieux qui fait en sorte que l'interviewé ne sait pas que c'est sa réponse qui se retrouvera en première page d'un quotidien trois jours plus tard.

La formulation des questions a un impact tout aussi grand. Ainsi, quel candidat (croyez/pensez/allez) vous (voter/appuyer) (maintenant/lors de l'élection). Autant de variantes de mots que de variantes de résultats.

Ainsi il est normal de croire qu'un biais méthodologique, au-delà de la très mathématique marge d'erreur, est souvent présent, malgré qu'il soit impondérable.